CONCERNANT L’ISLAM, L’OUMMAH UNIQUE, ET LES DIVERSES DOCTRINES THÉOLOGIQUES, JURISPRUDENTIELLES ET ÉDUCATIVES

Au nom d’Allah, le Tout Miséricordieux, le Très Miséricordieux

Louanges à Allah, Seigneur des Mondes. Que les éloges et le salut soient

Sur notre Maître Mohamed, Ultime Messager, sur les siens et sur ses compagnons

RÉSOLUTION N° 152 (1/17)

CONCERNANT

L’ISLAM, L’OUMMAH UNIQUE,

ET LES DIVERSES DOCTRINES THÉOLOGIQUES,

JURISPRUDENTIELLES ET ÉDUCATIVES

Le Conseil de l’Académie Internationale du Fiqh Islamique, de l’Organisation de la Conférence Islamique, réuni en sa 17e session à Amman (Royaume Hachémite de Jordanie) du 28 Joumada Al-Awal au 2 Joumada Al-Thani 1427H (24-28 juin 2006) ;

Ayant pris connaissance des études soumises à l’Académie concernant « l’Islam, l’Oummah unique, et les diverses doctrines théologiques, jurisprudentielles, et éducatives», et ayant suivi les débats qui se sont déroulés à ce sujet, ainsi que des résolutions de la Conférence Islamique Internationale organisée en 1425H (2005) qui avait appelé à l’étude et à l’adoption des principes formulés dans le message d’Amman ; et rappelant l’adoption ultérieure de ces principes par le Forum des Intellectuels et Érudits, réuni à Makkah Al-Moukarramah, préparatoire à la 3e Conférence islamique extraordinaire au Sommet;

DÉCIDE CE QUI SUIT :

Premièrement : Toutes les études traitant de ce thème ont unanimement reconnu les principes fondamentaux et intangibles de l’Islam. Aussi, la pluralité des doctrines idéologiques, jurisprudentielles et didactiques professées par les différents courants de pensée ne représente, en réalité, que le fruit des efforts interprétatifs de différents Oulémas soucieux de faciliter la pratique du culte. Tous ces efforts n’ont point d’autre but que de cimenter l’unité de la Oummah, d’en promouvoir les capacités intellectuelles, d’enrichir la pensée islamique et de propager le message éternel de l’Islam. Les études pertinentes soumises à l’Académie ont également abouti aux mêmes conclusions qui constituent le substrat du Message d’Amman, ayant permis d’expliciter et de mettre en exergue la vraie nature de l’Islam et son rôle dans la société moderne. Il conviendrait à ce propos de rendre un hommage mérité à Sa Majesté le Roi Abdullah II Ibn Hussein, Souverain du Royaume Hachémite de Jordanie, – qu’Allah (SWT) l’ait en Sa Sainte Garde – pour avoir parrainé le Message d’Amman et en avoir assuré la large médiatisation à l’échelle internationale.

Deuxièmement : Confirmation des résolutions adoptées par la Conférence islamique internationale tenue à Amman (Royaume Hachémite de Jordanie) sur « la Réalité de l’Islam et son rôle dans la société contemporaine », vu la conformité de ces résolutions avec les études et délibérations de cette session. Le préambule de ces résolutions s’est, du reste, référé aux avis jurisprudentiels et aux résolutions émises par les Comités de Fatwa et les Oulémas éminents des différentes écoles doctrinales (Madhahib), et ce, en souscrivant entièrement à ces avis et résolutions, à savoir :

  • Selon la Charia, quiconque suit l’un des quatre courants de la Sunna et de la Jama’ah (Hanafite, Malikite, Chafi’ites et Hanbalite), ou les courants Ja’afarite, Zaydite, Ibâdite ou Zâhirite, est un Musulman, et ne peut à ce titre être taxé d’apostasie. Son sang, son honneur et ses biens sont donc sacrés et intouchables. De surcroît, le Cheikh d’AlAzhar a émis une fatwa stipulant l’interdiction de traiter de mécréants les adeptes du dogme Acharite, du soufisme authentique, et de la Salafiya vraie. De même, accuser les autres de mécréants est par conséquent prohibé quand il s’agit d’une communauté de Musulmans qui croit en Allah et en Son Prophète (PSL), adhèrent aux fondements de la foi et du dogme islamique et ne contestent aucune des obligations religieuses connues de tous.

  • Les points de convergence entre les différents courants sont bien plus nombreux que les points de divergence. Les fidèles des huit écoles sont tous d’accord autour des principes fondamentaux de l’Islam. Ils croient en l’unicité d’Allah, et que le Noble Coran est la Parole d’Allah qu’Il a fait descendre et en a garanti, pour l’éternité, la préservation contre toute falsification. Ils croient aussi que notre Maître Mohamed (PSL), est le Prophète d’Allah et son Messager envoyé à toute l’humanité. Tous adhèrent aux cinq piliers fondamentaux de l’Islam, à savoir les deux professions de foi, la prière, la zakat, le jeûne du Ramadan et le pèlerinage à La Mecque, de même qu’aux fondements de la foi : la foi en Allah, en Ses Anges, en Ses Livres, en Ses Messagers, au Jugement Dernier, et au Destin (heureux ou malheureux). Les divergences entre Oulémas parmi les adeptes des différentes obédiences, ne portant que sur des questions secondaires et aussi sur quelques questions de fond, sont en réalité une bénédiction et un bienfait pour l’humanité. Les Anciens disent en effet que « la diversité des opinions des Oulémas est un signe de grande miséricorde ».

  • Reconnaitre les différentes écoles doctrinales (Madhahib) de l’Islam indique un engagement envers une méthodologie spécifique dans l’élaboration des avis jurisprudentiels (Fatwas). Il n’est pas permis d’émettre des Fatwas, sans avoir les compétences adéquates requises. Il n’est pas permis non plus d’émettre des avis jurisprudentiels (Fatwas) sans le respect d’une méthodologie appropriée de l’une des différentes écoles doctrinales (Madhahib), tout comme il est interdit à quiconque de se réclamer de l’Ijtihad (effort de réflexion) et d’inventer de nouveaux points de vue ou de nouvelles opinions qui sont rejetés et éloignent ainsi les musulmans des règles et principes de la charia et des avis bien établis au sein des écoles doctrinales.

  • La quintessence du Message d’Amman en date du 27 Ramadan 1425 H (9 novembre 2004) qui avait été rendu public dans l’enceinte de la Mosquée Hachémite, met en exergue l’engagement strict envers ces écoles doctrinales et à leurs méthodologies respectives. En effet, la reconnaissance de ces écoles et l’attachement au dialogue et à la convergence entre elles sont les seuls garants de la modération et du juste milieu, de la tolérance, de la clémence et du dialogue.

  • Nous appelons les Musulmans à bannir les différends, à parler d’une seule voix, à serrer les rangs, à se respecter les uns les autres, à renforcer la solidarité entre leurs peuples et leurs États, à resserrer les liens de fraternité qui les unissent dans l’amour d’Allah et à ne pas ouvrir la brèche à la sédition et à l’ingérence dans leurs affaires internes. Allah (SWT) nous dit : « Les croyants sont tous frères ; réconciliez-vous donc avec vos deux frères et craignez Allah, peut-être sera-t-Il clément à votre égard» (Al-Houjourat :10).

  • Les participants à la Conférence islamique internationale, réunis à Amman, capitale du Royaume Hachémite de Jordanie, à proximité de la Mosquée Al-Aqsa et des territoires palestiniens occupés, soulignent la nécessité de déployer tous les efforts pour protéger la Mosquée d’Al-Aqsa, première des deux Qiblas et dernière des trois mosquées vers lesquelles les musulmans sont invités à voyager pour y accomplir la prière, contre les périls et les agressions dont elle est la cible, et ce en mettant fin à l’occupation et en libérant les Lieux Saints. Des efforts similaires doivent être déployés pour préserver les sanctuaires islamiques d’Irak et partout ailleurs.

  • Les participants insistent sur la nécessité d’approfondir les concepts de liberté et de respect de l’opinion d’autrui à l’échelle du monde islamique. Louange à Allah Seul.

Troisièmement : Confirmation de la résolution n° 98 (1/11) de l’Académie concernant « l’Unité islamique » et les recommandations pertinentes qu’elle contient, et de la nécessité de mettre en place les mécanismes préconisés pour concrétiser l’unité islamique. En conclusion de ladite résolution, le Secrétariat de l’Académie a été invité à former un comité parmi ses membres et experts dont la composition et les attributs devraient être approuvés par l’Organisation de la Conférence islamique, à charge pour ce comité d’élaborer une étude scientifique et de proposer des mécanismes spécifiques en vue de concrétiser l’unité islamique dans les domaines culturel, social et économique.

Quatrièmement : Élaboration et présentation d’un ensemble de règles générales relatives aux questions faisant l’objet d’un consensus, et identification des questions controversées en vue de remonter à leurs sources de référence dans la Charia. Dans ce processus, les thèses des différentes écoles seront présentées de manière honnête et impartiale afin d’accorder une immense importance aux dénominateurs communs et de respecter les différences. En mettant en parallèle les différentes opinions, la justesse de chacune sera jugée à l’aune de la solidité de l’argument et de la conformité aux finalités de la Charia, et sans chercher à faire prévaloir l’obédience personnelle du chercheur ou à avantager le courant dominant dans telle contrée ou telle société.

Cinquièmement : L’enseignement aux étudiants et aux élèves des lycées de l’intelligence concernant l’unité islamique et l’éthique de la divergence d’opinion et du débat constructif, dont le point le plus important est de ne pas dénigrer l’opinion d’autrui sans forcément y souscrire.

Sixièmement : La restauration des méthodes d’éducation spirituelle conformes au Noble Coran et à la Sunnah, en tant que moyen d’enrayer les notions matérialistes en vogue de nos jours et d’empêcher la jeunesse de se laisser contaminer par les nouveaux modes de comportements qui ignorent les principes de l’Islam.

Septièmement : Les savants des différentes écoles jurisprudentielles sont invités à entreprendre un travail de conscientisation et de sensibilisation à l’impératif de modération en recourant à toute la panoplie des moyens tels que réunions communes, séminaires thématiques, et conférences publiques à organiser, avec le concours des organes en charge du rapprochement entre les « Mazahib ». Ces efforts viseront à rectifier les idées fausses et la perception tronquée des différentes doctrines idéologiques, jurisprudentielles et éducatives, en rappelant que les différentes doctrines se vouent exclusivement à l’application des principes et des commandements de l’Islam, et en expliquant aussi que la pluralité de ces courants de pensée est source de diversité et de complémentarité et non pas un motif de discorde et de confrontation. Il leur appartiendra également de mettre en exergue les spécificités et les mérites de chaque doctrine et d’accorder tout l’intérêt requis à la littérature qui s’y rattache.

Huitièmement : Le respect des différentes écoles (« Madhahib ») et doctrines n’empêche pas la critique constructive qui a pour but de maximiser les convergences et de minimiser les divergences. Il devrait y avoir ainsi un vaste champ de débat constructif entre les diverses écoles jurisprudentielles, à la lumière des préceptes du Noble Coran et de la Sunna du Prophète (PSL), afin de renforcer et de cimenter l’unité des rangs des Musulmans.

Neuvièmement : Les Musulmans se doivent de barrer la voie aux nouvelles écoles et tendances idéologiques qui sont antinomiques avec les commandements du Noble Coran et les enseignements de la Sunna. Si l’intolérance est inacceptable, il en va de même pour le laxisme. Il serait en effet aberrant de tolérer n’importe quelle allégation même quand elle est des plus suspectes. Des dispositifs doivent être mis en place pour déterminer qui peut réellement être qualifié de musulman.

Dixièmement : Il convient de rappeler que les différentes écoles doctrinales, jurisprudentielles et d’éducation spirituelle n’assument en aucune façon la responsabilité des exactions commises en leur nom telles que le meurtre d’innocents, les atteintes à leur dignité et le saccage de leurs biens.

RECOMMANDATIONS :

  • Le Conseil recommande au Secrétariat de l’Académie d’organiser des séminaires et des réunions en vue de débattre des causes sous-jacentes au conflit entre les adeptes des différentes écoles doctrinales afin d’empêcher que ses causes ne deviennent des facteurs de l’éclatement de la Oummah. Les délibérations pourraient porter sur le réexamen de certaines déclarations et références qui ont été mal comprises, mal appliquées ou ont fait l’objet d’une propagande tendancieuse, notamment :

  • La question de l’Allégeance et du reniement (Al Wala’ Wa Al-Bara’).
  • Le Hadith à propos du « Groupe sauvé» et les conclusions qui en découlent.
  • Les règles rationnelles à appliquer avant de taxer quelqu’un d’apostasie, de perversité ou d’hérésie.
  • Le verdict d’apostasie et les conditions d’application de la peine y afférent.
  • L’extension de la notion de péchés majeurs et les conséquences qu’il peut y avoir à accuser les autres d’avoir commis de tels péchés.
  • Accuser d’apostasie au motif de n’avoir pas appliqué pleinement les prescriptions de la Charia, sans faire la distinction entre les différents cas.

  • Le Conseil recommande aux instances compétentes des pays musulmans de prendre les mesures nécessaires pour interdire la publication et la diffusion des écrits de nature à approfondir les dissensions, à jeter l’anathème sur certains Musulmans taxés à tort de mécréance ou d’égarement, sans aucune preuve légale à l’appui de ces allégations.

  • Le Conseil recommande également aux instances compétentes de continuer à se référer totalement à la Charia dans l’émission de toutes les lois et de tous les règlements, conformément aux résolutions et recommandations adoptées par l’Académie à ses sessions précédentes.

Allah est le plus Savant

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